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Nasser Djemaï : Plongées oniriques à travers les générations

19 février 2020, par Untitled Magazine

Importante actualité en ce début d’année autour de trois oeuvres de Nasser Djemaï. Invisibles, Vertiges et Héritiers se sont joués quasi simultanément à La Colline et à la MC93 de Bobigny. À découvrir maintenant à travers la France.

Le comédien devenu auteur et metteur en scène (re)présente trois de ses créations envisagées comme une trilogie autour de la famille vue comme un enchevêtrement de rêves, de désirs, d’espoirs mais aussi de résignations. Nous nous concentrons ici sur Invisibles et Vertiges.

«La porte du passé était fermée, comme pour nous protéger, pour nous éviter d’être contaminés par une maladie contagieuse». (Nasser Djemaï)

Invisibles : «C’est un médicament ça, parler ?»

Un certain plaisir s’offre à nous avec la possibilité de (re)découvrir Invisibles, pièce crée en 2011. Dans une salle plongée dans un noir total, une silhouette apparaît doucement. Martin vient de perdre sa mère et découvre un indice le mettant à la recherche de son père inconnu. Il débarque alors dans un foyer pour chibanis («cheveux blancs» en arabe), travailleurs immigrés venus reconstruire la France. À l’origine, solitaires par choix -ils sont venus gagner de quoi nourrir leur famille restée au pays- ils le sont devenus par fatalisme ne sachant plus à quel monde ils appartiennent. Pour autant, si l’espoir s’absente de leurs pensées, ils savent se montrer sensibles à la recherche de Martin. Une cohabitation née alors, constituée de rires, de complications face aux mimiques du quotidien (on ne s’assied pas sur n’importe quelle chaise pour jouer aux dominos) et surtout de récits. Par instants, s’évoquent alors les souvenirs et les fantômes faisant revenir les âmes de ces travailleurs esseulés. Tous mêlés sur scène (intrigantes formes évanescentes projetées derrière les comédiens) nous soutenons les interrogations de Martin auprès de ces anciens. Pour au final, au-delà d’apprendre qui est son père, ce dont nous nous doutons assez rapidement, éprouver ici sur scène les mémoires de ces chibanis, maillons temporels avec lesquels nous repartons affronter notre présent. Loin de du triste exil qui a vu naître ces murs, nous découvrons un ensemble de rires et de silences constitutifs d’un gai courage qui s’offre à nous, générations suivantes.

crédits images : Jean-Louis Fernandez

Vertiges : «Je ne veux plus oublier»

Cinquième texte de Nasser Djemaï créé en 2017, Vertiges est le deuxième opus de la trilogie. La pièce ressemble à un théâtre plus classique, sous forme d’un huis-clos dans un appartement. Nadir, après l’échec de son mariage, revient dans sa cité natale auprès de ses parents et de son frère et sa sœur. Rapidement l’habitation peine à contenir les rêves et souvenirs de chacun. Entre volonté de certains de renouer avec leurs origines, de «connaître l’histoire ensemble», et des autres qui affirment que leur vie est ici et maintenant et que le reste est du passé, des troubles se font jour au sein de la cellule familiale. Écartelée entre deux rapports au présent, pour certains temporaire alors que pour d’autres fondement de la «nouvelle» histoire familiale, c’est la présence d’une étrangère en deuil, la voisine du dessus, qui va faire office de lien. Finalement il faudra faire l’expérience de la mort pour que cette famille hétéroclite se replace dans le cours du temps. Une certaine continuité s’affirme donc avec Invisbles et cela d’autant plus que nous retrouvons avec joie un des chibanis jouant ici le père (Lounès Tazaïrt). Mais ici les personnages semblent moins disposés au partage, emprisonnés qu’ils sont dans leur rapport branlant à leur histoire. Ainsi alors que nous nous faisions complices des interrogations de Martin auprès de ces ancêtres, la cellule familiale de Vertiges ne parvient pas à nous inclure et nous restons à distance. Demeure pour autant le plaisir de découvrir les trouvailles plastiques de la mise en scène qui nous plonge «dans un intérieur aux miroirs trompeurs, à la frontière de plusieurs mondes».

Invisibles Texte et mise en scène Nasser Djemaï Dramaturgie Natacha Diet Avec David Arribe, Angelo Aybar, Azzedine Bouayad, Azize Kabouche, Kader Kada, Lounès Tazaïrt et la participation de Chantal Mutel

En tournée le 3 mars au Théâtre Molière Sète, le 6 mars à l’Estive - Scène nationale de Foix, le 10 mars au Vellein - Scène de la CAPI Villefontaine, le 13 mars au Point d’eau - Ostwald

Vertiges Texte et mise en scène Nasser Djemaï Dramaturgie Natacha Diet Avec Fatima Aibout, Clémence Azincourt, Zakariya Gouram, Martine Harmel, Issam Rachyq-Ahrad, Lounès Tazaïrt

En tournée le 24 mars à la Scène nationale d’Alençon, le 9 avril à l’Avant-scène - Cognac, le 21 avril au Théâtre Jacques Coeur - Lattes, le 24 avril au Théâtre de la Maison du peuple - Millau

Héritiers Texte et mise en scène Nasser Djemaï Avec Anthony Audoux, Peter Bonke, Coco Felgeirolles, François Lequesne, David Migeot, Sophie Rodrigues, Chantal Trichet

En tournée le 14 février au Théâtre Liberté - Toulon, du 17 au 21 mars au Théâtre de la Croix-Rousse - Lyon, du 24 au 25 mars au Théâtre d’Angoulême




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