Le metteur en scène et fondateur du Théâtre Permanent, Gwenaël Morin, connu pour se pencher sur les tragédies du répertoire théâtral occidental, présente en cette rentrée une comédie adaptée du Songe d’une nuit d’été de Shakespeare. Le Songe du 28 novembre au 6 décembre au Théâtre Public Montreuil et en tournée.
Le Songe a tout d’un rêve fortuit : amorcé par une invitation au 77ème Festival d’Avignon dédié à la langue anglaise, qui s’est traduite par la mise à disposition de la maison de Jean Vilar et de son jardin en guise de scène, il réunit une bande de comédien.ne.s vieille de vingt ans. Ne tenait alors qu’à elleux de continuer de le faire (re)vivre à l’envie. S’engageant alors sur le sentier d’une frugalité volontaire à la stimulante créativité, chemin peu emprunté à notre époque technologique où écrans, micros, et effets foisonnants sont quasi de tous les spectacles, l’équipée de Gwenaël Morin s’est réduite à peau de chagrin. Quatre comédien.ne.s pour jouer tous les rôles. Les mêmes pour l’accompagnement musical. Pas de décor. Des feuilles et des draps blancs en guise d’accessoires. Pas de gradins. Et voilà en somme comment Shakespeare se retrouve au milieu d’une forêt de sièges en plastique. Et en même temps, que faire d’autre face à une pièce qui s’affirme être un rêve où différentes dimensions d’une même réalité se rencontrent ? Comme au réveil, ne reste que celleux qui, se souvenant, vont tenter de nous emmener à leur suite. Et qui sait, peut-être parviendra-t-on à faire rêve commun ?
Crédit photo : Christophe Raynaud-de-Lage
Alors, assis.e.s que nous sommes face à ces êtres qui jouent les fées, les amoureux.ses, les artisans, les princes, ce n’est pas dans la Grèce antique que nous sommes transporté.e.s mais dans le tourbillon de la création théâtrale. De l’histoire explorée à toute vitesse, on ne retient que les quiproquos, les sorts, tous plus révélateurs de la complicité qui se joue sous nos regards amusés. À chaque tirade amourachée, on ne sait qui prend le plus de plaisir entre le.la récitant.e et son auditoire. On rit ensemble des un.e.s et des autres. On se laisse emporter dans la valse des entrées et des sorties. On serait même prêt.e à prendre un des rôles que joue tel ou telle comédien.ne, non pas pour l’alléger dans sa gymnastique physique, vocale et mémorielle, mais par ce que ça a l’air si bien de jouer la comédie, tout simplement. Comme si nous apparaissait aussi, à nous, le chemin du texte, des dialogues, du jeu.
C’est sans doute là que s’explique le vif plaisir ressenti face à cette création. En revenant à un théâtre essentiel, nu, léger, Gwenaël Morin nous place activement dans la même arène que Shakespeare et que ces comédien.ne.s. Ou plutôt, il scie les pieds surélevés de la scène, casse les murs du théâtre pour y faire entrer la vie. Et sans cette co-présence à l’oeuvre, fondamentale à toute ébauche d’idée et de dialogue, impossible pour reprendre le nom du cycle commencé avec Le Songe, de « démonter les remparts et finir le pont »*.
*Démonter les remparts pour finir le pont
Crédit photo : Christophe Raynaud-de-Lage
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« Le Songe »
adaptation, mise en scène et scénographie Gwenaël Morin
d’après William Shakespeare
avec Virgine Colemyn, Julian Eggerickx, Barbara Jung, Grégoire Monsaingeon et Jules Guittier, Nicolas Prosper
au Théâtre Public Montreuil du 28 novembre au 6 décembre, à La Coursive, La Rochelle du 12 au 14 décembre, au Théâtre de la Coupe d’or, Rochefort du 19 au 20 décembre, au Théâtre Garonne, Toulouse du 10 au 18 janvier 2024, à l’Estive, Foix le 23 janvier, au Parvis, Ibos du 25 au 26 janvier, au Malraux du 31 janvier au 1er février, au Théâtre de Bressuire le 7 mars, au TAP, Poitiers du 12 au 14 mars, à l’Empreinte, Brive les 19 et 20 mars, au Spaziu, Cargèse le 29 mars, à l’Aire-Libre, Saint-Jacques-de-la-Lande, les 3 et 4 avril.