Pour la huitième année consécutive, tout l’été, et chaque semaine, Untitled Magazine vous propose trois livres à lire. Que vous soyez dans votre maison de campagne, au bord de la plage, entre amis ou encore au travail, vous devriez trouver votre bonheur.
HHhH, Laurent Binet
Dans son premier roman, Laurent Binet met en scène un personnage tristement célèbre de l’Histoire : Reinhard Heydrich, celui qui a été le chef de la Gestapo du régime nazi et le bras droit d’Himmler. Il choisit plus précisément de raconter l’assassinat d’Heydrich à Prague alors qu’il imaginait la “solution finale” et mettait en place l’extermination des Juifs.
Mais au-delà de l’épisode historique raconté par l’auteur, ce livre est une fascinante réflexion sur ce que signifie écrire un roman historique, sur les normes du genre et sur le rapport entre fiction et réalité. En effet, comment retranscrire les dialogues entre des personnages quand on n’a que des sources rapportées ? Comment décrire même les personnages, leurs tenues, leurs attitudes ? Laurent Binet s’interroge tout au long de l’écriture du roman, en prenant un ton détendu bien que sérieux.
On prend un malin plaisir à suivre le parcours des personnages historiques qui commettront l’assassinat contre Heydrich, en même temps qu’à découvrir les tribulations de l’écrivain face à la tâche d’écrire un roman historique. Indubitablement un incontournable du genre !
Critique rédigée par Mathilde Ciulla
HHhH, Laurent Binet, Editions Le Livre de poche, 448 pages, 9,40€
Dans les coulisses du musée, Kate Atkinson
Ruby Lennox naît en 1951 en Angleterre, troisième soeur d'une mère qui n'a pas de qualité maternelle et d'un père absent. Elle vit au-dessus de l'animalerie que tiennent ses parents. Dans ce long roman fleuve se dévoile l'épopée d'une famille dans l'Angleterre des années 50. La force de ce long roman, c'est sa narratrice qui décrit ses premières peurs, ses jeunes années, son adolescence et sa vie d'adulte. Elle décrit d'un oeil critique la société anglaise et ses croyances mais surtout sa famille. Un livre familiae, c'est une enquête que mène la jeune Ruby tout au long de sa vie pour décrire comment elle est devenue cette femme.
Dans ce long roman, vous allez traverser les âges et les époques, suivre la trace de la jeune Ruby dans des événements anodins comme des vacances mais aussi des événements marquant avec les guerres mondiales ou le couronnement d'Elizabeth II. Ce sont aussi des histoires de femmes, celle de sa mère Bunty, sa grand-mère Nell et ses soeurs et même son arrière grand-mère Alice, puis il y a aussi ses soeurs. Chacune de ces femmes a son histoire et Ruby leur fait la part belle.
Ce livre se lit comme un livre de chevet, on peut picorer dedans chaque jour grâce à des courts chapitres et des épisodes que Ruby raconte. C'est un roman complet sur une famille et ses deuils, mais aussi sur ses joies et sur ce qui fait famille.
Critique rédigée par Mathilde Jarrossay
Papa courait les paris, Louise Meriwether
Été 1934. A Harlem, où Francie, 12 ans et sa famille vivent, les effets de la Grande Dépression se font ressentir plus qu’ailleurs. Dans l’incapacité de trouver un travail, son père se lance avec espoir dans les paris, mais sans jamais gagner. Sa mère court les ménages, répare les vêtements et tente de joindre les deux bouts pour ses enfants. Junior, le frère aîné, vit une vie dangereuse auprès des gangs de rue.
Écrit dans les années 70 et traduit pour la première fois en France, ce roman retrace le quotidien d’une famille noire dans le quartier d’Harlem à travers le regard de la jeune adolescente Francie. Entre prostitution, paris, gangs de rue, et journée rude et précaire, Louise Meriwether s’inspire de ses souvenirs d’enfance et raconte la ségrégation. L’auteure, aujourd’hui centenaire, décrit avec précision ce quotidien précaire, cette vie dure où chacun doit se battre pour trouver sa place et tenter de survivre dignement. Malgré ses douze ans, le regard de Francie est sans illusion sur la société et les rapports humains. Entre les contraintes de la scolarité, les premiers émois sexuels, ses rêveries de jeune fille mais aussi sa prise de consciente naissante de la question noire, la romancière décrit avec habilité la condition noire à Harlem.
Un magnifique roman d’apprentissage qui mêle injustices, réalités et joie de vivre !
Critique rédigée par Marie Heckebenner