UNTITLED MAGAZINE
Avec La Louve de Dêrsim, Yasmina Kramer nous plonge au coeur de l’héroïque combat des femmes kurdes, en première ligne face aux affrontements avec les islamistes de Daech.
13 novembre 2015, Paris est touchée par les attentats. Au même moment, à des milliers de kilomètres de là, les forces kurdes tentent de libérer la ville de Sengal, en Irak. Sur le front, les femmes demeurent en première ligne. Berfin, la narratrice est une jeune kurde. Après des études de droit, elle s’est engagée dans une unité combattante, placée sous la responsabilité d’Assia, son amie d’enfance. Comme toutes les femmes, elles sont là pour défendre leur peuple mais aussi pour faire valoir leur liberté de femmes.
Une lutte pour les kurdes et pour la liberté des femmes
Au lendemain de la chute de l’empire Ottoman, le Kurdistan est divisé entre la Turquie, l’Iran, l’Irak et la Syrie. Alors que le pays est souvent en proie à des attaques de la part de la Turquie et de l’Etat Islamique, bon nombre de femmes kurdes se sont levées contre les assaillants refusant d’être les esclaves des hommes. “Les femmes détiennent la sagesse, si elles deviennent comme les hommes, ce sera la fin de l’humanité.”
Journaliste, Yasmina Kramer s’est intéressée de près depuis des années au sort des femmes kurdes. Après avoir publié de nombreux reportages, elle laisse avec ce roman place à la fiction pour rendre hommage à celles qui ont choisi de combattre au même titre que les hommes. Un combat qu’elles mènent sans relâche pour leur liberté et pour leur existence même. “Si la paix pouvait embrasser ce monde juste un jour, une trêve, une pause pour que l’on sache après quoi on court”.
A la manière d’un journal de bord que tiendrait la juste narratrice Berfin, Yasmin Kramer nous immerge dans le quotidien de ces femmes au front. Entre poste d’observation, espionnage et attaques éclairs, on plonge directement dans cette guérilla urbaine où les civils se cachent sous les décombres et les barbus sont prêts à tout pour se sacrifier et monter au paradis. “Nous devons reconnaître à l’ennemi une certaine efficacité dans le combat. Dans leurs rangs, chaque division n’est pas obligée de référer à un commandant pour agir. Les combattants évoluent par petits groupes, entre dix et quinze hommes, ce qui les rend très mobiles pour éviter les frappes aériennes, et ils mènent des attaques éclair.” On pénètre ainsi dans l’intimité de ces femmes, de leur foi, de leurs conditions mais surtout leur soif d’émancipation et de liberté. Ici, comme la narratrice tient souvent à le rappeler, la Raison surpasse l’obscurantisme.
D’une langue simple mais acerbe, Yasmina Kramer livre un témoignage bouleversant de réalisme, et nous catapulte au plus près du réel (malheureusement encore d'actualité).
"La louve de Dêrsim", Yasmina Kramer, Editions Belfond, 192 pages, 20 €
