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"Un long, si long après-midi", un livre de Inga Vesper

2 mai 2022, par Marie Heckenbenner

Dans la veine de La Couleur des sentiments, Inga Vesper livre un premier roman prenant où, derrière le polar, se dévoile un roman social, celui de toute une société en pleine mutation en plein cœur d’une Amérique étouffée par son sexisme et son racisme ordinaire.

1959, Sunnylakes en Californie. Dans cette banlieue chic de Los Angeles, Ruby, une jeune femme noire, vit de ménages qu’elle fait chez les riches blancs. Mais un matin, lorsqu’elle arrive chez Joyce, personne n’est là pour l'accueillir. Les enfants sont seuls, le bébé hurle dans sa chambre et sa sœur tente en vain d’essuyer des taches de sang sur le sol de la cuisine. Où est passée Joyce ? Est-ce un meurtre ou une fugue ? Dépêché sur les lieux, Mick l'inspecteur chargé de l'enquête découvre que la jeune Ruby a déjà été arrêtée…

Une vie rêvée… ou presque !

Dans cette banlieue résidentielle de LA, ces mères de familles vivent au rythme des enfants, des devoirs, du quotidien et de leurs maris. Une vie rêvée qui se révèle être pour beaucoup d’entre elles, une vie d’ennui. Car tout n’est en effet qu’apparence dans ce quartier en trompe l'œil. “La plupart des femmes, ici, se marient en sortant de l’université. Elles deviennent femmes au foyer, elles élèvent leurs enfants et vont à l’église. Et voilà. Personne ne s’intéresse à leurs désirs ou à leurs rêves. Tout le monde se fiche de leurs talents et de leurs opinions.”

Joyce vit auprès de deux petites filles, d’un mari présent, mène un train de vie agréable, appartient au club des femmes de la ville et se fait aider par une jeune bonne qui s’occupe des travaux ménagers. Mais voilà, cette vie si bien rangée, ce n’est pas pour elle. Elle se languit d'une autre vie faite d'aventures et de découvertes. Jusqu'à ce beau jour, où elle disparaît. “Hier, j’ai embrassé mon mari pour la dernière fois. Il ne le sait pas, bien sûr. Pas encore. En réalité, j’ai du mal à y croire moi-même. Pourtant, quand je me suis réveillée ce matin, j’ai su que c’était vrai.”

Polar sous fond de ségrégation

Dès les premières pages, les préjugés vont bon train avec la jeune Ruby. Dans une société où les Noirs ne se mélangent pas encore avec les Blancs, elle est pour beaucoup la coupable idéale. “Maintenant c’est la fin de la ségrégation et ça n’est pas mieux. Les Noirs et les Blancs vivent toujours séparés. Nos maisons sont séparées, nos emplois sont séparés, nos vies sont séparées. Et ce sera toujours comme ça”.

Injustement soupçonnée et emprisonnée par la police, l’employée de la maison sera finalement relâchée par l’inspecteur, qui lui ne voit pas d'un bon oeil cette accusation. Tout juste débarqué de New York, jugé par sa hiérarchie en raison d’une faute professionnelle qu’il traîne tel un boulet, ce dernier est sommé de faire ses preuves et de résoudre cette sordide histoire. Et c'est avec l'aide de Ruby, qu'il va tenter de lever le mystère sur cette disparition. 

Tel un roman choral, Inga Vesper fait intervenir trois protagonistes aux existences bien différentes les unes des autres : Joyce Haney, Ruby Wright et Mick Blanke, et permet à l’autrice d’aborder ces sujets sous différents prismes tels que le sexisme, le racisme, la lutte sociale, la condition des afro-américaines, la place des femmes dans la société... Un premier roman prenant qui brosse le tableau d’une Amérique à deux vitesses, où les bourgeoises blanches meurent d’ennui et les Noirs, victimes de préjugés, doivent se battre pour se faire entendre.

"Un long, si long après-midi", Inga Vesper, traduit par Thomas Leclere, Editions de La Martinière, 22,90 €




auteur
Amoureuse des livres et dénicheuse de bons restos🍷 Journaliste et fondatrice d'Untitled Magazine. Pour la joindre : m.heckenbenner@untitledmag.fr


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