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Rentrée littéraire : « Cher connard » de Virginie Despentes

14 septembre 2022, par Laurence Lesager

Incontournable de cette rentrée littéraire, Virginie Despentes frappe à nouveau avec un titre coup de poing, moderne et féministe. Roman épistolaire sociétal, Cher connard aborde de nombreux thèmes comme le mouvement #MeToo, l’addiction aux réseaux sociaux et ses conséquences, la drogue, les relations familiales, le genre humain, le culte de la beauté ou encore la crise du covid-19. Dans cet échange entre Oscar et Rebecca, une amitié salvatrice des maux du XXIe siècle va naître.

C’est à l’issue d’une publication Instagram d’Oscar que la correspondance entre Rebecca Latté et lui va commencer. Loin d’être amicale au début, cet échange entre ces deux toxicos va rapidement se nouer en amitié.

L’affaire Zoé Katana

En insultant Rebecca sur les réseaux, Oscar a eu son moment de gloire, mais l’actrice n’a pas tardé à répliquer, et ce, personnellement, en lui écrivant une lettre des plus virulente : « Cher connard, J’ai lu ce que tu as publié sur ton compte insta. (...) Gloire aux réseaux sociaux, tu l’as eu ton quart d’heure de gloire. La preuve, je t’écris. (...) j’espère que tes enfants crèveront écrasés sous un camion et que leurs yeux gicleront de leurs orbites et que leurs cris de douleur te hanteront chaque soir. »

Il faut savoir qu'Oscar est un auteur en pleine polémique #MeToo. Zoé Katana, une de ses anciennes attachée de presse, maintenant influenceuse féministe, affirme qu’il l’a agressée sexuellement, il y a de ça quelques années : « Je ne l’ai pas violée, je n’ai pas levé la main sur elle, je n’ai pas essayé de l’avoir en faisant du chantage. Je n’ai pas demandé qu’on la licencie. Aujourd’hui, elle raconte partout que c’est l’éditeur qui a dû prendre cette décision parce que je menaçais de me suicider si elle ne cédait pas et que c’était devenu ingérable. »

De nature cash, Rebecca ne peut s’empêcher de répondre à sa lettre et, par la même occasion de lui donner son avis sur le féminisme, le mouvement #MeToo et la condition des femmes au XXIe siècle. De lettres en lettres, les deux artistes vont trouver du réconfort à s’écrire et échanger sur divers sujets, surtout qu’Oscar pique la curiosité de Rebecca en lui rappelant qu’elle et sa sœur étaient meilleures amies enfants.

Les Narcotiques Anonymes

Si Oscar et Rebecca sont différents sur de nombreux aspects, ils ont en commun le goût de la défonce -drogue, alcool- et cet usage de substances illicites les a marqué. Chacun à leur façon. Oscar a été le premier des deux à réagir et à aller aux NA (Narcotiques Anonymes), notamment pour oublier la bad buzz médiatique dont il est le sujet : « Je ne me plains pas, mais le seul moment où j’oublie ce qui m’arrive, c’est quand je vais à Narcotiques anonymes. En général, il faut que je me force. Avant d’y aller je suis convaincu que cette fois ça ne va pas marcher, que ça ne vaut pas la peine. Et je me trompe. »

La drogue, comme l’alcool, a fait partie de leur quotidien. Cela les a aidé à vaincre partiellement l’ennui du confinement, à se divertir, et à se donner confiance : « Quand je tourne, je ne me défonce jamais, parce que ça se voit à la caméra et ça donne des plans immontables. Et aussi le tournage est le seul moment où, quoiqu’on passe des heures à attendre, il y a suffisamment d’intensité pour que je ne m’ennuie pas. Mais le reste du temps, ce n’est pas marrant sans la came. » Mais face à la réalité et aux conséquences sur leur santé, physique comme psychique, l’un va tirer l’autre vers le haut. Oscar, avec son passif, va tout de même se lancer dans le grand bain des réunions Narcotiques. Le retour positif qu’il en fait à Rebecca dans leurs correspondances sonne à ses yeux comme un défi : « Mais tu m’agaces avec ton cirque de “je suis clean”, je le prends comme un défi. Je suis assez compétitive, dans l’ensemble. Dommage que je n’aime pas le sport, j’ai un caractère de championne. »

Cher Connard reste fidèle à ce qu’on peut attendre d’un Despentes : engagé, enragé, efficace et d’actualité. Virginie Despentes brosse le portrait d’êtres humains livrés à leurs névroses et angoisses avec en toile de fond et pour message la puissance de l’amitié face à la faiblesse des Hommes.

"Cher Connard", Virginie Despentes, éditions Grasset, 352 pages, 22 euros.




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Rédactrice chez Untitled depuis 2021, Laurence est libraire passionnée de littérature et de tout ce qui touche au monde de l'art et de la culture


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