Dans ce premier roman d'une série de sept livres, Asta Olivia Nordenhof plante le décor de cette saga qui porte sur l'incendie volontaire du ferry "Scandinavian Star" en 1990. A travers cet incendie, elle décrypte les usages d'une société qui broie ses citoyens, d'un système de consommation et les travers du monde actuel.
Le 7 mars 1990, entre Oslo et le Danemark, un incendie ravage le Scandinavian Star entraînant la mort de 159 passagers à bord. L'enquête révèle que cet incendie est volontaire, débouchant sur une arnaque aux assurances de la part des armateurs et propriétaires du bateau.
Dans ce premier roman, l'auteure met en scène deux personnages, Kurt et Maggie, perdus dans un mariage et dans une vie où joindre les deux bouts est difficile. Pour s'en sortir, Kurt va investir dans le Scandinavian Star mais c'est sans se douter des conséquences.
Les conditions d'un drame
Pour relater ce drame, Asta Olivia Nordenhof introduit des personnages fictifs. Kurt, propriétaire d'une compagnie de bus et Maggie, sa femme, qui vivent comme ils peuvent à Odense, une existence assez morose entre les problèmes d'argent et l'ennui autant chacun de leur côté que dans leur couple.
D'un côté, Kurt, homme idéaliste mais un peu perdu dans sa vie de conducteur de bus, n'a pas beaucoup de passion, ni beaucoup de désir. Il se traîne dans une existence qui lui paraît un peu longue. Après un premier mariage qui s'est soldé par un échec, il rencontre Maggie. Maggie, elle, est frappée par la beauté de Kurt après une vie de débauche, de voyage malgré elle.
"C'est quoi l'amour ? Maggie me regarde avec un visage pareil à une prière sans contenu. Comme s'il ne restait que la seule forme de la prière, un contour infernal. Je ne sais pas, chère Maggie. Raconte, pour que je puisse l'écrire."
Les deux personnages ont un côté lyrique. Maggie vit en révant d'ailleurs, elle ressasse sa vie, en pensant à d'autres villes, en pensant à d'autres hommes. Kurt, lui, s'imagine partout sauf au volant d'un bus. Dans ce grand roman tragique, le couple sert d'argument politique à l'auteure. Elle montre comment l'appât du gain, comment l'opportunité de faire fructifier son argent va entraîner Kurt dans une sombre histoire. C'est un roman social, et pas seulement un roman sur un fait divers : Asta Olivia Nordenhof se sert de cette arnaque pour montrer que ce grand coup monté ne fait que refléter la société actuelle - les plus riches peuvent contrôler les plus faibles.
Une saga aux accents de vérité
Histoire vraie, Asta Olivia Nordenhof revient sur un drame qui a coûté la vie de 159 personnes pour de l'argent. Partant de ce constat, l'auteure construit un récit comme une enquête sur les conditions qui ont mené à ce drame et comment cet incendie a aussi eu un impact sur des personnes de la société civile dans cette grande arnaque.
« Cent cinquante-neuf personnes périrent. Il est malheureusement vraisemblable qu'elles soient mortes parce que d'autres désiraient réaliser une plus-value financière »
Entre les pages de récit sur Kurt et Maggie, c'est une enquête journalistique qui apparaît. Asta Olivia Nordenhof nous donne sa version des faits, elle raconte la grande histoire du bateau. Les magouilles financières des différents propriétaires du bateau en passant par la personnalité de ceux-là, elle dresse un portrait complet de l'affaire.
« Quelque chose et quelques personnes peuvent avoir à mourir pour que d'autres puissent y gagner. Telle est l'idée. Le capitalisme est un massacre ».
C'est un projet ambitieux que monte l'auteure, et c'est aussi rendre justice aux morts dans l'incendie.
Un grand début de saga pour un tableau d'un drame et de la société malade dans laquelle nous vivons.