Vous aussi vous êtes perdu.e.s avec toutes les sorties récentes, tous les livres qu’on vous conseille et toutes les recommandations des libraires jusqu’à en oublier de lire des bandes dessinées ? Pas d’inquiétude, on a pensé à tout et on vous concocte des sélections de nos BD préférées !
Sunugal, retour au village, David Lessault & Damien Geffroy
A Saly, sur la côte atlantique du Sénégal, les habitants sont inquiets. Ce petit village de pêcheurs va voir son port et son marché rayés de la carte, et déplacés plus loin pour accueillir une station balnéaire avec des résidences pour touristes.
Salomé, une jeune Française, travaille dans une association de réinsertion pour les jeunes au Sénégal. Aristide, son grand-père, retraité, décide de passer les vacances de Noël auprès de sa petite fille. Avec son ami Génésio, récemment veuf, les deux grands-pères partent à la découverte de ce pays d’Afrique où ils rêvent de vivre une expérience au plus près des habitants. Dans l’avion, les deux compères retrouvent leurs voisins - qui eux ont réservé un hôtel pour touristes all inclusive - mais feront aussi la connaissance d’Ibrahim, un Sénégalais de retour au pays.
Entre découvertes et rencontres locales, Sunugal nous transporte dans un pays bouleversé par la nouvelle économie, où tout est encore à construire. A travers le développement de cette petite ville côtière, David Lessault s’applique à montrer les bienfaits du tourisme éthique et solidaire et l’importance des projets alternatifs qui permettent une cohabitation saine entre locaux et touristes. Entre documentaire et fiction, l’auteur signe un récit fait de différents parcours où se mêlent tradition, modernité, désillusion, espoir et envie d’ailleurs. Une belle réflexion sur ces pays en pleine mutation.
Critique rédigée par Marie Heckenbenner
"Sunugal", David Lessault & Damien Geffroy, Editions Steinkis, 128 pages, 20€
Fille d'alcoolo, Camille Gallapia
Dans cette bande dessinée hautement intime, l'autrice et dessinatrice Camilla Gallapia nous fait entrer dans son histoire personnelle et nous raconte l'alcoolisme de sa mère, ainsi que ses effets sur sa famille. A l'aube de ses 40 ans, Camille s'interroge sur quelle personne était sa mère, désormais décédée, à cette âge-là, l'occasion pour elle de refaire le cours de sa vie.
Née à Marrakech, ses parents déménagent dans l'Oise et elle grandit en étant très proche de ses trois soeurs, sans jamais pourtant trouver sa place dans cette famille où elle ne semble jamais être suffisante pour ses parents. Elle rencontre ensuite le père de Camille et de leur union naîtront Camille et sa soeur ainée. La famille est heureuse mais la mère de Camille ne travaille pas et, d'ennui en dépression, elle tombe dans l'alcool. Elle dort quand ses filles rentrent de l'école, elle fait honte à Camille quand elles sortent et qu'elle est saoûle, elle est désagréable avec ses filles.
Celle que Camille appelle "L'autre" prend le pas sur sa mère, une femme pourtant douce et drôle que l'autrice aime retrouver et redécouvrir au fil des périodes de sobriété de sa mère. Les dessins en noir et blanc de Camilla Gallapia donnent toute leur place à la tristesse, la honte et la culpabilité ressentie par la narratrice : nous suivons son enfance et la lutte contre l'alcoolisme de sa mère, sa façon de se construire avec ce tabou et cette honte. Ce récit très touchant de l'amour inconditionnel d'une fille pour sa mère malgré sa maladie donne la parole aux enfants d'alcooliques qui sont souvent oubliés dans les prises en charge médicales des patient.es alcooliques.
Une bande dessinée qui raconte le poids d'un tel secret sur une enfant et la lutte d'une femme pour se sortir de l'alcoolisme.
Critique rédigée par Mathilde Ciulla
"Fille d'alcoolo", Camille Gallapia, Editions Larousse, 208 pages, 16,95€
Jeanne Chauvin, la plaidoirie dans le sang, Aurélie Chaney & Djoina Amrani
Paris, 1886. La jeune Jeanne Chauvin déterminée à devenir avocate se lance à corps perdu dans des études de droit jusqu’alors réservées aux hommes. Brillante et déterminée, et après avoir obtenu son doctorat en droit et sa licence en lettres, elle prêtera serment en 1900 et sera la première femme, en 1901, à plaider en France. Une bataille qu’elle a dû mener de front pour forcer la porte des prétoires. En effet, la loi de l’époque n'autorise pas les femmes à exercer ce métier, réservé aux hommes. Il fallut attendre la modification de la loi (votée en 1900) pour autoriser les femmes licenciées en droit à être avocates.
Malgré une opinion mitigée et des railleries incessantes de la part d’hommes et de femmes, rien ne l’arrête. Après avoir présenté sa thèse “Les professions accessibles aux femmes”, et avec son doctorat en poche, elle enseigne dans les lycées parisiens pour jeunes filles avec un seul but : les encourager à choisir des carrières judiciaires.
De ses combats à ses engagements en faveur de l’émancipation féminine, en passant par son dévouement et ses grandes ambitions, Aurélie Chaney nous plonge dans la vie extraordinaire de Jeanne Chauvin. Dans le Paris de la Belle Époque, où il était mal vu de travailler, l’avocate - bien décidée à faire bouger les choses - s’est dévouée toute sa vie pour faire évoluer le droit des femmes. Un ouvrage nécessaire, qui revient sur les prémices du féminisme et prouve à toutes jeunes filles qu’il est important de se battre pour ses convictions.
Critique rédigée par Marie Heckenbenner