Vous aussi vous êtes perdu.e.s avec toutes les sorties récentes, tous les livres qu’on vous conseille et toutes les recommandations des libraires jusqu’à en oublier de lire des bandes dessinées ? Pas d’inquiétude, on a pensé à tout et on vous concocte des sélections de nos BD préférées !
Fragments : rassembler les coeurs brisés, Anaïs Schenké
Coline file le parfait amour avec Aubin et attend avec impatience la soirée d'anniversaire de ses 30 ans, où tou.tes ses ami.es seront présent.es, ainsi que son amoureux. Mais tout ne se passe pas comme prévu : alors qu'Aubin lui a préparé une super journée d'anniversaire, il est très distant au cours de la soirée et finit même par la quitter pour aller à la soirée de "potes de potes". Coline s'interroge et s'inquiète, et elle a raison : Aubin la quitte quelques jours plus tard, par visio.
La jeune femme ne comprend pas ce qui lui arrive, alors que leur relation a été émaillée de tous ces signes de l'univers qui prouvaient qu'iels étaient fait.es l'un.e pour l'autre. Iels se sentaient si bien ensemble, tout paraissait simple et logique, iels n'arrivaient pas à croire qu'iels ne s'étaient pas rencontré.es avant... Et Aubin le lui disait constamment, à l'aide d'une avalanche de messages quotidiens. Comment comprendre que l'amour se soit évanoui si vite dans le coeur d'Aubin ? L'a-t-il jamais aimée ?
Coline est perdue, elle souffre et se sent vide. Tout s'est arrêté d'un coup, et Aubin a laissé un trou béant au milieu de sa poitrine. La jeune femme va alors devoir entreprendre le deuil de sa relation, malgré les incompréhensions, le manque et la tristesse. Un deuil difficile, qu'elle ne comprend pas, empli de violence envers elle-même et le monde. Mais un deuil nécessaire qui lui permet de remettre en doute la conception de l'amour hétérosexuel dans notre société, les attentes que la société nous a mis en tête pour nos relations et de rassembler les morceaux d'elle-même, qu'elle avait perdus dans la violence de la rupture.
Un roman graphique au trait fin, en noir et blanc, où les dessins et l'omniprésence des fleurs nous fait entrer dans l'intime de la dessinatrice mais aussi dans l'universel de la souffrance entraînée par une rupture amoureuse.
Corps vivante, Julie Delporte
Avec Corps vivante, Julie Delporte nous fait le témoignage de sa sexualité. Une sexualité marquée par des agressions banales, des injonctions et des clichés. Ce corps vivant, c’est aussi tout ce qu’elle a enduré dans sa vie et dans sa découverte d’elle-même. Des relations sexuelles avec des hommes à celles avec des femmes. A travers ses dessins et son témoignage, Julie Delporte nous offre son histoire et son parcours : comment elle est devenue lesbienne à 35 ans. C’est aussi un ouvrage qui retrace son questionnement sur le désir sexuel et son rapport au corps, à l’autre, à la communication et à la place des traumas dans les relations.
C’est un roman graphique doux-amer tout en sensibilité et subtilité où l’auteure se dévoile et se met à nu. Les dessins au crayon de couleurs et tons pastel sont inspirés des divers séjours et explorations qu’elle a fait au Québec : l’île verte, la Gaspésie, le jardin botanique de Montréal, et sont étroitement liés à des parties intimes, à un érotisme lesbien. C’est un ouvrage extrêmement audacieux et surtout intime. Une introspection du soi, accompagnée de réflexions personnelles, de séances de psychanalyses, mais aussi d’auteures féministes comme Monique Wittig ou encore Rosa Bonheur et Chantal Akerman. Un parcours parfois épineux vers la découverte de soi et de ses désirs.
"Corps vivante", Julie Delporte, Editions Pow Pow, 268 pages, 27 €
Juqu'à Raqqa, Nicolas Otero & André Hébert
Par conviction politique, le jeune journaliste français André Hébert (son pseudonyme) part en Syrie combattre Daesh aux côtés des Kurdes. Après avoir discuté avec l’un des membres du YPG via Facebook, il réserve un billet d’avion afin de se rendre au Rojava tout en mentant à sa famille sur les raisons de son absence prolongée. Sur place, rapidement initié au métier de soldat et à la langue kurde pour intégrer avec les autres occidentaux les unités de Défense du Peuple kurde, il comprend très vite qu’ils sont destinés à rester à l’abri des combats. Dès lors, il fera tout pour rejoindre le front…
A la fois journal de guerre et manifeste politique, André Hébert sous les dessins de Nicolas Otero, nous interroge sur nos valeurs et l’implication de nos troupes dans les conflits armés. De retour en France, et après des années de guerre, revenir à une vie normale est plus que difficile. Pour se libérer, le jeune journaliste a décidé de témoigner pour que son combat contre l’islamisme radical reste vain et ne tombe dans l’oubli. Au fil des pages, il écrit sa biographie et nous relate son quotidien en Syrie ce qui nous permet d’appréhender sous une autre dimension le conflit. L’auteur livre une expérience passionnante, mais aussi dure et violente qui ne peut éviter certaines scènes difficiles mais réalistes. Un récit aussi poignant qu'instructif !
"Juqu'à Raqqa", Nicolas Otero & André Hébert, Editions Delcourt, 120 pages, 17 €