Orpheline est le portrait d’une femme que l’on suit à quatre âges de sa vie. Que ce soit en petite fille de la campagne, en adolescente ballottée de fugue en fugue et d’homme en homme ou en jeune provinciale qui monte à Paris, la violence la suit et fait partie intégrante de sa vie. Au point de devenir un personnage du récit.
Adèle Haenel est Renée, l'héroïne à 27 ans.
Remonter le temps pour mieux comprendre
Dans ce drame, Arnaud des Pallières prend le pari de raconter l’histoire en remontant le temps à rebours. On fait la connaissance de Renée à 27 ans jusqu'à remonter vers son enfance. Pour le réalisateur c’est « comme dans la vie : on rencontre quelqu’un dans le présent et pour connaître ce qu'il est vraiment on remonte le temps. » Ainsi, on fait la connaissance de plusieurs aspects de sa personnalité pour mieux comprendre ce qu’elle est devenue, qui se construisent en imbrication à l'image d'une poupée russe. Le choix de prendre quatre actrices différentes renforce ce sentiment et donne plus de puissance à cette histoire inspirée de la vie de sa co-scénariste.
A 13 ans, Karine (Solène Rigot) est le personnage le plus touché par la violence.
Une violence assumée et dérangeante
Arnaud des Pallières raconte l’histoire « d'une petite fille, d’une adolescente, d’une jeune femme et d’une femme dans un monde fait par les hommes pour les hommes ». Avec sa mise en scène, il parvient à intégrer à la vie de son héroïne une violence tant physique que psychologique, nécessaire dans un monde qui sans elle ne serait qu'illusion. Un choix que le réalisateur assume dans son film, comme porté par la volonté de ce dernier de mettre au jour une souffrance bien réelle mais trop souvent tue. Par le rapport extrêmement chaotique de son personnage avec la violence, le sexe et les hommes, il nous donne aussi sa vision du monde d’aujourd’hui : un monde sans compromission, à comprendre à travers une grille de luttes, de combats et d'affrontements perpétuels.
Adèle Exarchopoulos n'a pas grand chose à se reprocher face à une Gemma Arterton plutôt fausse.
Une réalisation trop forcée
Avec une réalisation très proche des personnages par ses gros plans, Arnaud des Pallières tente de rapprocher au maximum le spectateur de l’héroïne. Malheureusement, la tentative est exagérée. Piégé dans ce rapport intime avec les personnages, on ne parvient à rentrer complètement dans l’histoire. Bien que l'on ressente une violence malsaine devenir partie intégrante du récit, il pratiquement impossible de se sentir concerné.
Bouleversant et touchant, le film souffre tout de même d’irrégularités de scénario qui le rendent – trop – souvent inintéressant. Adèle Haenel, Adèle Exarchopoulos, Solène Rigot et Vega Cuzytek sont toutes les quatre parfaites dans le rôle principal. Pour autant, les personnages secondaires sont beaucoup moins rutilants et les jeux approximatifs de Gemma Arterton et Jalil Lespert n’aident pas. Seul Nicolas Duvauchelle tire son épingle du jeu grâce à l'écriture intelligente et cohérente de son personnage. En père violent qui n’a pas été épargné par la vie, il vient renforcer le propos du film quand les autres ne font que rester en périphérie.
Nicolas Duvauchelle hérite du meilleur rôle secondaire dans l'histoire la plus intéressante du film.
Orpheline se perd un peu dans son développement et reste très irrégulier. L’histoire, pas toujours intéressante, peut sonner fausse à plusieurs moments. L’inconstance de narration des quatre histoires ne permet pas au spectateur de se plonger pleinement dans la vie d’une héroïne pourtant profondément touchante. Arnaud des Pallières signe un film au capital émotionnel faible et qui paraît malheureusement très long malgré un sujet nécessaire et puissant.
https://youtu.be/66oVwrbZ6sI