Il est responsable des archives 16mm liées au sport, à l’Institut National du Sport. Il a sorti « l’Empire de la perfection » en 2018, sur les Internationaux de France de tennis en 1984 et la défaite de John McEnroe face à Ivan Lendl. Julien Faraut rend visible dans « Les Sorcières de l’Orient » l’histoire d’ouvrières devenues le symbole de la puissance japonaise.
Dans les années 60, au Japon, une équipe féminine de volley-ball se forme au sein de l’usine Nichibo, à la demande du groupe textile du même nom, dans le but de créer une équipe de haut niveau. Entraînées par Daimatsu Hirobumi, un ancien joueur de volley-ball, cette équipe devient rapidement la meilleure équipe du pays, puis du monde. Prénommées « Les Sorcières de l’Orient », ces femmes se sont très peu exprimées sur leurs performances. Jusqu’à ce documentaire, réalisé par Julien Faraut, qui leur laisse la parole avec justesse pour revenir sur leur aventure extraordinaire.
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Rigueur et sacrifices
Une des prouesses de Julien Faraut réside dans sa capacité à avoir retranscrit la discipline à laquelle étaient soumises les sportives, sans parti pris. En retraçant l’histoire de la constitution de cette équipe, le réalisateur donne à voir toute la rigueur et le travail qu’elles ont fourni. Dans ses images, elles racontent les entraînements de 16h à minuit après leur service à l’usine, 6/7j, 51 semaines par an. Elles se livrent aussi sur leur entraîneur, sa rigueur et son exigence et, sur ce qu’elles ont enduré pour atteindre le record incroyable d’une série de 258 victoires sans discontinuer. Le documentaire questionne son rôle sans jamais porter un regard immuable : était-il un tortionnaire, ou les considérait-il simplement comme étant capables de s’entraîner « comme des hommes » ? Ce n'est pas à lui, mais aux joueuses de le raconter.
Les Sorcières du soft power
Dans le Japon des années 60, le temps est à la reconstruction. 15 ans après les destructions massives de la fin de la Guerre du Pacifique, Tokyo est rebâtie et l’économie est relancée.
L’équipe féminine de volley-ball devient emblématique de la puissance renouvelée du pays. Grandes gagnantes des Russes, championnes en titre, aux championnats du monde de 62, « les Sorcières de l’Orient » se retrouvent dans l’obligation de continuer à s’entraîner pour concourir aux Jeux Olympiques de 1964. Et pour cause : le Japon est alors hôte, et le volley-ball fait son introduction comme discipline olympique.
Avec délicatesse, on comprend la pression, l’instrumentalisation du sport comme un outil diplomatique et géopolitique et comment cette histoire est surtout celle de la construction de figures nationales.
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Une parole à elles
Les Sorcières ont aujourd’hui entre 73 et 83 ans. Elles qui se sont peu exprimées durant des années, elles qui ont été source d’inspiration pour nombre d’animés sportifs, prennent aujourd’hui la parole dans « Les Sorcières de l’Orient ». Elles partagent leur quotidien, leurs souvenirs. Ce sont leurs voix qui racontent derrière les images d’archives et les animés qui s’articulent pour redonner vie à leurs performances sportives. Elles racontent sans prétention, sans quête de célébrité, leur ambition collective. On les découvre très grandes compétitrices avec, chevronnée au ventre, l’envie incommensurable de gagner. Envie qui les a emmenées sur la première marche des podiums les plus convoités du monde en 1964.
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La fascination de Julien Faraut pour les performances des athlètes de haut niveau dépasse la simple démonstration de la compétition et les standards du documentaire sportif. A l’aide de la traductrice Catherine Cadou, il réussit avec brio à redonner vie à cette formidable performance sportive.
« Les Sorcières de l’Orient », de Julien Faraut, sortie le 28 juillet.