Premier long métrage de Steve Achiepo, Le Marchand de sable met en exergue les conditions difficiles des immigrés arrivant en France et obligés de se loger dans des logements sommaires. Un film puissant qui traite du mal-logement et de l’exploitation des réfugiés par les marchands de sommeil et interroge sur les limites du bien et du mal.
Ni bien ni mal
Après des années passées derrière les barreaux, Djo, interprété par le rappeur Sams (Validé, La vie Scolaire, Patients) est livreur de colis en banlieue parisienne. Il vit une semaine sur deux avec sa petite fille, dans l’appartement de sa mère, surpeuplé où habitent aussi tantes et oncles dans un espace réduit. Un jour, une tante qui vient de fuir le conflit ivoirien sonne chez Djo avec ses trois enfants. Dans l’urgence, il demande l’aide de son ami “Le colonel”, qui réussit à leur trouver un logement, mais ce dernier est insalubre. Face à des arrivées de plus en plus nombreuses et à des demandes de plus en plus croissantes, Djo - piégé par sa gentillesse générale - devient marchand de sommeil.
Alors que le racisme, les inégalités et la corruption se mélangent, la question de la solidarité va contraindre le personnage interprété par Djo, à faire des choix loin de son éthique personnelle. Le film met aussi en avant la manipulation faite par les hommes d'affaires (interprété ici par Benoît Magimel) prêt à tout pour récupérer des milliers d’euros, quitte à faire voler en éclat la vie des plus démunis.
Une histoire personnelle à raconter
Steve Achiepo s’est inspiré de son histoire personnelle pour écrire le scénario. À l’âge de 20 ans, alors agent immobilier dans le 16 ème arrondissement de Paris, il est confronté à un problème.
Alors qu’il vend un appartement à un monsieur, ce dernier revient vers lui pour mettre en location un appartement, avec pour seule condition de ne pas le louer à une personne de couleur. Choqué et décontenancé, cette histoire à longuement travaillé le réalisateur qui indique aujourd’hui avoir “participé à la question du racisme au logement”. Confronté également à la question des marchands de sommeil, son histoire et son expérience personnelle lui ont permis de nourrir son scénario et de proposer un film ultra réaliste.
Crédit photo : The Jokers Films
Un film documenté pour alerter
Pour nourrir le film, le réalisateur s’est documenté en se rapprochant d’associations caritatives, des mairies et autres institutions. Durant de longues heures, il s’est également entretenu directement avec des Ivoiriens ayant eux-même fui ce conflit. Pour rappel, cette crise politique a débuté suite au second tour de l’élection présidentielle ivoirienne de 2010, premier scrutin depuis 10 ans dont le résultat amènera à un différend électoral, à la suite de fraudes présumées. Une crise qui a fait plus de 3 000 morts et qui a entraîné la fuite de nombreuses familles.
Grâce à ces échanges, le réalisateur a pu ainsi retranscrire la réalité sur grand écran, pour immerger au mieux les spectateurs. Des échanges qui lui ont permis aussi de montrer le travail des associations ainsi que des services sociaux. A l’écran, on découvre ces assistantes sociales débordées par l’afflux des migrants et contraintes malgré elles à prioriser les arrivées…un rôle interprétée avec justesse par Ophélie Beau (Mektoub, my love : canto uno), qui se retrouve tiraillée entre ses valeurs personnelles et les ordres données par sa direction.
En France, 4 millions de personnes souffrent de mal logement, des logements souvent en mauvais état ou suroccupés.Le marchand de sable est accompagné par la Fondation Abbé Pierre pour sensibiliser et alerter.
Crédit photo : Lea Renner
En salle depuis le 8 février