Synopsis À l’arrivée de leur professeur principal remplaçant, une classe de sympathiques lycéens se trouve confrontée à une discipline accrue et à un enseignement plus austère. Ce professeur d’allemand concentre vite toutes les critiques. Les élèves mènent ouvertement la fronde. La tension monte, et quand une jeune fille de la classe se suicide, la responsabilité du professeur parait indiscutable aux yeux de ses camarades. L’escalade des provocations ne fait alors que commencer, laissant les autres enseignants dépassés par les événements et les élèves face à toutes leurs violentes contradictions.
C’est une jolie surprise que fait Rok Bicek au cinéma d’auteur slovène et aux téléspectateurs. La Slovénie, qui produit moins d’une dizaine de films par an, a peut être trouvé son représentant. En effet, avec L’ennemi de la classe, le réalisateur frappe un premier grand coup (entendre « long métrage », car il réalisait avant ça des documentaires).
Dans un lycée qui n’a a priori rien à envier aux plus réputés des établissements, les élèves semblent heureux, souriants et pleins d’entrain. Dans la première partie du film, on rencontre une classe gaie, en bonne harmonie avec ses enseignants. C’était sans compter l’arrivée d’un professeur remplaçant, Mr Zupan, aux méthodes qui peuvent prêter à débat, un personnage froid, distant. A cette rencontre compliquée vient s’ajouter un évènement tragique, le suicide d’une camarade. Alors va débuter, comme le décrit le réalisateur lui-même, un vrai combat, comme une dispute sur un ring, entre deux parties, les élèves d’un côté, les professeurs de l’autre.
Peu importe le pourquoi du suicide, peu importe au final les vrais causes de tout ce capharnaüm. Le sujet, c’est la guerre psychologique qui naît d’une réalité triste et qui va opposer deux mondes où chacun va tenter de se faire entendre et de raisonner l’autre. Tout le long du film, dont les 1h50 défilent, l’esprit tenu par cette tension et cette frustration qui plombent l’ambiance, on se demande de quel côté va pencher le cœur du réalisateur. On le comprendra à la toute fin, lors d’un discours empreint de vérité et d’humanisme.
Techniquement aussi, le film est intéressant. Les cadrages sont serrés, la caméra toujours au plus près des visages, de façon à ce que chaque expression, chaque sentiment soit ressenti au maximum. Pour augmenter encore plus l’impression d’étouffement, toute l’action se déroule en huis clos, dans le lycée. C’est une fois seulement le nœud défait que Bicek s’autorise une petite scène à l’air frais, pour respirer un peu. Quant au jeu des acteurs, il est maitrisé. Le réalisateur n’oublie personne. Chaque élève est unique, les uns avec leur part de lucidité ou leur insensibilité, les autres avec leur profonde tristesse, leur rébellion et l’insoumission qui caractérise leur jeune âge. Igor Samobor, qui jour le rôle du professeur remplaçant, est déstabilisant de froideur mais ne tombe pas, malgré la droiture qui caractérise son personnage, dans le stéréotype du dictateur sans cœur.
Sur le fond, sur la forme, un très beau premier film, à aller voir.
- Rob Bicek s’est inspiré pour L’ennemi de la classe de faits vécus pendant sa propre adolescence, où il était témoin et acteur, comme dans le film, de la rébellion de ses camarades de classe après la mort de l’un d’entre eux.
- Il a trouvé la citation de Thomas Mann que l’on voit souvent : « La mort d’un homme est davantage l’affaire des survivants que la sienne. » vers ses 16 ans, lorsqu’il jouait à un jeu vidéo de guerre. A chaque fois que son personnage mourrait, cette phrase apparaissait à l’écran. Il savait déjà, à cette époque, qu’il la réutiliserait plus tard quelque part dans son œuvre.
- Certains acteurs sont des professionnels (Mr Zupan) alors que d’autres ne le sont pas (certains élèves). La professeur de psychologie, quant à elle, est la vraie enseignante du lycée, dépêchée en urgence, car l’actrice qui devait l’incarner a eu au dernier moment un problème d’agenda.
L’ennemi de la classe Un film de Rok Bicek. Avec Igor Samobor, Natasa Barbara Gracner, Tjasa Zeleznik… Sortie le 4 mars 2015.
Prix du public au Festival Premiers Plans d’Angers 2014. Meilleur film – Prix du public – Prix de la critique au Festival du film slovène 2013.
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