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"Chien" : fable de cruauté et d'égoïsme

5 avril 2018, par Untitled Magazine

Adaptation de son livre éponyme, "Chien" de Samuel Benchetrit attire les regards et les interrogations. Perturbant esthétiquement et psychologiquement, il est véhicule de la dénonciation d’une société cruellement égoïste, qui peut faire de nous des chiens.

Jacques Blanchot perd tout: sa femme, son travail, son logement. Il devient peu à peu étranger au monde qui l’entoure, jusqu’à ce que le patron d’une animalerie le recueille.

Esthétique et pratique du malaise

Chien, c’est l’histoire de Jacques. Vincent Macaigne, une fois de plus magistral, se glisse dans la peau de cet homme pris dans une spirale infernale : après une rupture avec sa femme, il doit quitter le domicile familial, achète un chien qui se fait écraser sur la route quelques heures après, et perd son travail. Rejeté par son entourage et éloigné de ses repères, il est recueilli dans l’animalerie où il avait acheté son chien. Maltraité, il en devient à son tour un.

© JO VOETS - UMEDIA - SINGLE MAN PRODUCTIONS

Dès la première scène, le spectateur commence à sentir le malaise opérer : la femme de Jacques, jouée par Vanessa Paradis, ne peut plus vivre avec son mari. Elle lui explique qu’il est à l’origine de sa maladie de peau, une maladie très rare qui la fait se gratter compulsivement lorsqu’elle est à son contact. Profondément bon et bienveillant, Jacques accepte de quitter le domicile familial. Une bonté poussée à l’excès, profitable à la cruauté et à l’indifférence de ses pairs, et indéniablement à l’origine de sa transformation en chien, soumis à la volonté et cruauté de son maître. Cette transformation esthétique dérange par l'accroissement de la maltraitance subie par Jacques et sa soumission, peinte sur fond de scènes sombres et lugubres.

La Fontaine du XXIème siècle

Chien peut être lu comme la métaphore de l’oppression qu’un individu peut ressentir et subir au sein de notre société. La bonté exprimée en toutes circonstances par le personnage principal est écrasée et profite aux égoïsmes et à la cruauté de son entourage. N’y a-t-il pas de limites à la cruauté et à l’égoïsme? Sommes-nous condamnés à être soumis à des maîtres? Quelle place donne-t-on à l’empathie pour l’autre aujourd’hui? Une réflexion qui, si elle peut de prime abord sembler très binaire, prend tout son poids dans la réalisation très sombre de Benchetrit; comme un écho lointain aux fables de La Fontaine et à leurs critiques acerbes, dissimulées sous les atours d'histoires agréables mais non moins cruelles. 




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