Étape incontournable des amateurs de musique dites "indépendantes", le Pitchfork festival a encore une fois tenu ses promesses, entre vieux routards et belles découvertes.
Première étape du Pitchfork cette année, l'Avant garde. Mardi 30 et mercredi 31 octobre, rendez-vous était pris pour une déambulation dans les différentes salles de concert de Bastille pour y découvrir les pépites de demain. La première soirée commence avec la voix magnifique de la jeune RIMON et son RnB tout en délicatesse. Superbement accompagnée, l'artiste anglaise fait chavirer le Badaboum. Direction ensuite le Supersonic à quelques encablures pour y découvrir la soul de Starchild & The New Romantic. Devant une salle conquise, celui qui a notamment accompagné Solange à la guitare démontre déjà un réel sens du show. Seul bémol, nous aurions aimé le voir accompagné d'un groupe mais ce n'est que partie remise. Ce premier soir se termine au Pan Pipper avec Appolo Noir qui nous livre un live noir et torturé au milieu de ses machines.
Mercredi, retour au Badaboum avec Biig Piig qui nous étale déjà toute sa maturité lors d'une prestation sublime. Si la tendance nous amène parfois - et même trop souvent - vers une surdose de voix féminine sur des mélodies lo-fi - Pitchfork n'échappant pas à la règle - Biig Piig nous donnerait presque de la frustration en annonçant son dernier morceau. Ce qui demeure toujours bon signe. Nous voilà ensuite parti en direction du Café de la Danse pour y voir et écouter Cautious Clay, le jeune artiste américain qui ne cesse de monter. Si nous devions ressortir un petit point négatif de cette Avant garde - le second serait d'avoir loupé Hatchie au Supersonic le même soir - il serait ici. L'électronique matinée de soul que nous attendions s'est vu remplacée par une sorte de rock FM façon fin des années 90. Dommage car la voix du jeune artiste demeure sublime. Direction une terre bien connue pour terminer cette seconde soirée, le Supersonic où nous venions donc de louper la pop toute en légèreté d'Hatchie. Mais Yuno allait très vite nous le faire oublier avec une prestation rayonnante. La salle ne s'est pas trompée en étant encore une fois pleine à craquer.
Jeudi, début des festivités sous la Grande Halle de la Villette. Nous arrivons pour Cola Boyy qui réchauffe une salle déjà bien remplie avec ses sonorités disco paillettes imparables. Ça groove et on aime. Très attendu, le jeune prodige Yellow Days livre une prestation impressionnante. Entouré de musiciens à peine plus âgés que lui, Georges Van Den Broek de son vrai nom, embarque la foule de sa voix blues et éraillée sur des textes alternant entre légèreté et profondeur. Une future grande voix de la musique. Après cette douce euphorie débarque John Maus. Frappé par un drame il y a quelques mois, l’artiste se lance seul sur scène. Fidèle à lui-même durant ses performances live, il se livre corps et âme – littéralement – pour une prestation puissante dont nous mettrons quelques minutes à nous relever.
Alors que nous étions plutôt sceptiques sur la performance à venir d’Étienne Daho – jurisprudence Route du Rock 2018 – le Rennais a donné un concert tout bonnement excellent. Heureux d’être présent, il enchaine les titres et les tubes pour le plus grand plaisir du public au milieu d’une scénographie léchée et visuellement impressionnante. Après une pause repas durant The Voidz – le début nous laissant sceptique – nous revoilà devant ce bon vieux Mac DeMarco. Et si ce n’est pas la première fois que nous le voyons, le plaisir est toujours le même, celui de se demander ce qui nous attends. L’ancien coloc de John Maus est resté fidèle à lui-même, livrant ses tubes les plus connus au milieu de nouveaux morceaux, sous les yeux d’inconnus et du chauffeur de son bus invités à assister au concert sur scène, bien accompagnés par quelques bouteilles et une jolie nappe verte.
Vendredi, l’univers faussement léger de Lewis Ofman nous accueille sous la Grande Halle. À peine le temps d’écouter la fin que le très attendu Car Seat Headrest foule les planches de l’autre scène. Sous des airs de nerds un peu fébrile se cache un songwriter efficace et incroyablement prolifique. Du rock indé dans sa définition la plus pure pour une heure de concert sans répit. Rien à voir avec Bagarre, le groupe parisien de punk en jogging qui retourne littéralement la Grande Halle avec ses hymnes à l’hédonisme et la liberté.
Deux belles têtes d’affiches concluent la soirée du vendredi. Tout d’abord Chvrches et sa synthé-pop efficace et agréable. Et enfin Blood Orange, qui envoute le public venu nombreux et qui ne s’est pas trompé. Sa funk teintée de RnB irradie la salle. Quelle classe.
Samedi, l’impatience se fait sentir chez tout le monde en attendant Bon Iver, tête d’affiche du festival. En début de soirée, la folk aux accents punk de Stephen Malkmus nous lançait doucement dans une nuit qui allait être longue. Suivra Unknow Mortel Orchestra, avant l’arrivée de Bon Iver devant une foule déjà compacte presque 30 minutes avant.
Autour d’une mise en scène sauvage donnant envie de chausser ses outils de rando et partir découvrir l’Islande, le groupe de Justin Vernon nous livre une folk sublime reprenant ses vieux classiques dont l’inégalable Holocene et des morceaux de son dernier album, plus électroniques. Un moment en suspension comme Bon Iver est l’un des rares à nous offrir.
La nuit se poursuivra jusqu’à six heures avec la partie « club ». Si Avalon Emerson nous offre un set magnifique et pointu, Peggy Gou, sensation de cette année, peine à faire décoller le public avec une techno-funk qui nous laisse sur notre faim.
Pas de surprises notables à noter durant ce Pitchfork mais de beaux moments portés par une machine désormais bien huilée. On se dit à l’année prochaine!