Si on ne devait choisir qu’un album de rock progressif pour résumer l’année 2012, An awesome wave d’ALT-J serait immanquablement dans la compétition. Le groupe britannique avait renouvelé le genre en proposant des titres jouissifs, planants et tous plus agréables les uns que les autres. Forts de leur succès immédiat, ils ont passé l'année 2013 sur la scène des festivals, allant de Rock en Seine à Coachella en passant par Glastonbury ou les Eurockéennes, et à se produire dans des salles plus intimistes - ce qui convient tout aussi bien à leur musique plutôt calme et ondulatoire. Puis l’hiver a passé et les quatre garçons d’ALT-J se sont un peu essoufflés. Ils ont perdu leur guitariste, Gwil Sainsbury et ont du se remettre au travail pour relever le défi d'un nouvel album qui soit à la fois fidèle au précédent, et à la fois innovant. Angoisse que tout artiste pour-qui-ça-a-marché-un-moment connaît un jour, au risque de disparaître avec une oeuvre grandiose mais unique. Alors voilà, ALT-J revient cet automne avec un album placé sous le signe du Japon : This is all yours, et voilà ce qu'on en pense.
Après une flopée de vocalises criardes en guise d’Introduction, le titre Arrival in Nara nous plonge avec léthargie dans ce nouveau voyage thématique. Le titre a des allures de berceuse : pas vraiment désagréable, mais un peu engourdissant. Ce n’est qu’avec Nara et Every other freckles que l’album commence à ressembler pour de bon à du Alt-J. On y retrouve avec joie les mélodies de basse qui soutiennent ces envolées vocaliques propres au chanteur et le fameux « hey ! » qu'il envoyait déjà dans Taro avec énergie. L’Interlude : Garden of England déroute et dénote avec le reste. Etrangement, il rapelle une audition ratée de flûte à bec mais enfin, passons. On a toujours envie d'être indulgent avec Alt-J.
On avait découvert il y a quelques mois Left hand free qui propose des samples et des rythmiques plus pop que les autres morceaux et rend un peu de dynamisme à l’album dont certains titres comme Pusher ou Warm Foothills semblent un peu mous. Malgré tout, ce sont des titres comme The gospel of John Hurt, Choice Kingdom ou Hunger of the Pine qui relèvent le niveau de l'album qui a quelques faiblesses. Ce sont eux qui font qu’ALT-J reste ALT-J pour les mélodies planantes et douces qu’ils savent produire, parce que la voix de tête du chanteur s’accorde si bien aux accords de guitare et aux sons saturés qu’ils y laissent, parce qu’ALT-J était – et garde sa place– de groupe qu’on aime autant voir en festival les jours d'été qu'en live sur Arte, la nuit. Même magie, même awesome wave of sound.