
Je me retrouve devant un porche qui ne paye pas de mine, je pianote sur le digicode, j’entre, je monte jusqu’au 5ème étage et me retrouve sur un palier. Sans savoir vraiment à quoi m’attendre, je sonne. La porte s’ouvre et l’on m’invite à entrer. J’ai l’impression de plonger dans une double page du magazine Art&Décoration. Les moulures au plafond sont bien blanches, les murs sont gris, parsemés de dorures, une cheminée en marbre règne en pièce maitresse, et un immense sapin trône au milieu du salon, nous rappelant que oui, les fêtes et leurs cadeaux sont à prévoir. On me propose très gentiment un verre de vin. Tout le monde est très bien mis, les talons sont hauts, les chemises tirées aux quatre épingles, les cheveux bien lisses, brossés, lustrés. Tous les invités semblent captivés par une conversation formidable. Tout est beau, mais sonne terriblement faux.
Je fais rapidement le tour, mais je constate qu’il est difficile de voir ce qui fait œuvre dans ce mélange bon chic bon genre de bienséance. Non pas que je sois fan du trash, ni même encore des grandes pièces surdimensionnées, ni de quoique ce soit d’extravagant, mais je trouve que tout cela manque cruellement de sincérité. Où est l’art? Je vois bien quelques toiles aux murs, des bibelots sur une table blanche, mais rien de vraiment rechercher. Tout est fondu. Un style de vie se voulant luxueux, des tenues se voulant branchées, un art voulant se vendre. Bref, je demande au maître des lieux de me faire une petite présentation de ces artistes (parce que bon). Il commence à m’expliquer le concept de sa galerie. L’idée était de brusquer les codes du white cube et d’offrir au collectionneur, une simulation de ce que pourrait être l’œuvre en contexte (chez lui quoi). Hm, pourquoi pas. Mais lorsqu’il me parle de ces artistes, je ne vois pas la lueur de la passion passer dans ses yeux. Pourtant, bien que les œuvres de Laetitia Disone ne soient pas d’une originalité folle, il faut reconnaître que ses toiles noires et blanches à la cubiste revisitées ont du charme. Et l’artiste Jibin Im, un sculpteur coréen qui propose des sculptures de sujets fait en résine et peint à la main, a ce charme de l’art consumériste asiatique qui rappelle les grands succès de Takashi Murakami.
C’est sympa mais vraiment pas transcendant. Tout est trop lisse et résonne un peu faux. Beaucoup de fastes pour une démarche que je n’ai pas sentie vraiment engagée. Ce qui se ressent dans mon papier. Deux lignes sur les artistes, le reste sur l’environnement. Une galerie où l’art (incluant le design ici) n’est pas habité d’une véritable profondeur, dessert les artistes représentés. Bien sûr, les codes de l’art contemporain et du monde des galeries sont ce qu’ils sont : il faut vivre et donc vendre, mais un peu de ferveur ne fait de mal à personne. Peut-être est-ce trop demander.