Lydia Blasco Yubero, directrice de contenu chez Cuarto, nous en dit plus sur la genèse de ce projet de publication, ses enjeux et son unicité.
Cuarto est une publication périodique qui touche aux domaines adjacents à l’architecture dans un contexte actuel et contemporain. Crée par d’anciens étudiants de l’école d’architecture de Madrid, Cuarto est un projet hybride et créatif où le fond possède autant d'importance que la forme. Essais, entretiens et articles visuels viennent rythmer cette revue qui nous instruit et nous interroge sur des environnements en constante mutation.
Untitled Magazine : Pouvez-vous nous en dire plus sur la genèse de ce projet ?
Lydia Blasco Yubero : Cuarto est né à Madrid à l’école d'architecture. En faisant nos études, nous avions toujours en tête de monter un projet de publication d'architecture mais avec la crise, on a tous été obligés de partir un peu à droite à gauche. Il y a eu un éclatement de l'équipe à Londres, en Amérique du sud, en Belgique, au nord de l'Espagne, etc. Ce dispersement n’a pas empêché de continuer le projet, bien au contraire, chacun s’est approprié son environnement et s’est inspiré de ce contexte géographique pour apporter sa contribution au magazine.
Nous avons commencé à discuter de ce projet en 2014 et il nous a fallu environ 1 an et demi pour le concrétiser avec la sortie du 1er numéro en janvier 2015. Actuellement, nous sommes 6 personnes à diriger la revue.
UM : Que signifie le mot Cuarto ? A quel sens se rapporte-t-il dans votre revue ?
LBY : Le mot Cuarto signifie « pièce », nous l’avons choisi car il représente le concept même de la revue. Cuarto: Architecture Playground, ça parle de différents terrains de jeu, d’environnements, de contributeurs qui apportent chacun leur pièce à la revue. Cuarto veut également dire « quart », ce qui est lié au fait que nous faisons 4 numéros par série.
® Cuarto, Abnormal
UM : On voit beaucoup de revues bilingues, pourquoi avoir décidé d’opter pour une version trilingue ?
LBY : Quand je suis allée à Paris, je me suis vite rendue compte que la langue française était très importante si l'on voulait vraiment s’adresser et communiquer avec le public français, c’est d'ailleurs presque nécessaire. C’était aussi un challenge pour nous de faire ces allers-retours dans trois langues différentes, cela donne à la revue un aspect international atypique.
UM : En quoi Cuarto se diffère-t-elle d’une autre revue architecturale ? Quelle est son unicité ?
LBY : Aujourd’hui, on a le sentiment que toutes les revues doivent se définir par des termes bien précis. Or, on ne veut pas être seulement définis comme une revue de projets d’architecture. On préfère dire que l’on est une revue d’architecture mais pas pour les architectes, c’est plus que ça, c’est une revue de réflexion autour de l’architecture et de ses domaines connexes.
Dans Cuarto: Architecture Playground, on trouve des essais, des entretiens, des articles visuels et des analyses de projet. Chaque numéro est différent de l'autre car tout dépend des contributions que l’on reçoit suite à la thématique que l’on aura diffusée. Les profils des contributeurs sont divers ; on cherche à donner des voix à d’autres acteurs qui ne sont pas issus de l’architecture : géographes, illustrateurs, sociologues, photographes, historiens de l’art, etc.
® Cuarto, Abnormal
UM : Vous fonctionnez par série de thématique, en ce moment la disruption, et chaque numéro est lié à un sujet soulevé par cette même thématique. Que signifie, dans les grandes lignes, la notion de disruption dans l’architecture ?
LBY : La disruption est un mot que l’on entend beaucoup mais dont on peine à trouver un véritable sens. Chez Cuarto, on a voulu s’approprier ce concept pour notre première série de numéro car il fait référence à un mouvement actuel. Nous vivons aujourd’hui dans un contexte de changement, c’est un moment historique assez particulier. Nous avons souhaité redéfinir et repenser l’architecture au travers de la revue pour amener quelque chose de nouveau et de novateur.
UM : Cuarto a un design et un graphisme très affirmé, pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre identité visuelle ?
LBY : Nous donnons autant d’importance au graphisme qu’au contenu écrit. Le design graphique est selon nous le connecteur et le traducteur des différentes disciplines qui sont actées dans la revue. En termes d’identité graphique, Cuarto se redéfinit constamment, c’est une revue contemporaine qui n’est pas figée dans le temps. Ainsi, nous avons beaucoup évolué du premier au second numéro, et on ne sait pas encore de quoi sera fait le troisième.
On tient beaucoup à la couleur en tant qu’identité graphique et c’est pour cela que nous avons choisi ce pantone qui retient bien le regard. Nous ne limitons la quadrichromie qu’à des contenus qui nous semblent nécessaires d’être imprimés en couleur. Dans le cas du second numéro, nous les avons imprimons en dehors du magazine sous forme de cartes postales.
Concernant le logo, il représente une sorte de composition de pièces différentes qui rappelle la signification du nom de la revue. La couverture du second numéro a été créée par Badesaison, un studio de design suisse, qui a réinterprété le thème de notre second numéro, Abnormal, en créant des formes géométriques impossibles.
® Cuarto, Abnormal
UM : On constate, avec des événements comme le festival Offprint, que le secteur de l’édition indépendante à beaucoup à nous apporter par sa créativité. Avez-vous vous-même un coup de cœur en terme de revue ?
LBY : J’ai beaucoup aimé la revue Migrant découverte au festival Offprint. C'est une revue qui parle de la migration dans tous les sens de terme, c’est un concept très actuel et en termes de design ils sont très pointus. Récemment, j’ai également fait la découverte d’Octopus Notes, une revue d’art française.
UM : Quels sont vos projets pour la suite ?
LBY : La sortie de notre troisième numéro, toujours à travers la série Disruption. On ne sait pas encore quelle sera la date de sortie ni le thème abordé, mais ce qui est sûr, c’est que l’on réfléchit beaucoup à sa forme. Il y aura une évolution sur ce point, on tient vraiment à ce que la forme reflète la thématique abordée.
-- Cuarto: Architecture Playground Second numéro : Abnormal, série Disruption 16 euros Editions Pupa Press