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Critique : Ma Loute, un film de Bruno Dumont

27 mai 2016, par Untitled Magazine

Ma Loute, présenté en compétition au Festival de Cannes est un curieux film. Contrasté, absurde et bien souvent fantasque, le panorama social que nous propose Bruno Dumont vaut le détour !

Quelle étrangeté que ce Ma Loute ! La presse l’encense, les spectateurs restent sur la réserve et cet écart n’a d’égal que le déséquilibre du film. L’histoire est simple, elle nous amène au début du XXème siècle, sur une magnifique baie du nord de la France. C’est l’été et la famille Van Peteghem, riches bourgeois lillois, prend l’air marin dans l’illustre (et moderne) maison familiale. Face à eux, plus loin dans la baie, vit une famille de rustres pêcheurs. Mais voilà, les touristes viennent mystérieusement à disparaître les uns après les autres et l’inspecteur Machin ouvre, avec son acolyte Malfoy, une enquête des plus improbables…

© Roger Arpajou © Roger Arpajou

Les horribles bourgeois, plus accrochés à la bienséance qu’à une quelconque idée d’humanité, côtoient les abominables cueilleurs de moules brusques et accessoirement cannibales. De ces immondes parodies familiales naît l’amour. Un amour passionnel entre Ma Loute, fils de pêcheur, grogneur et bestial et Billy, adolescent(e) androgyne et angélique.

Bouillonnement d’ingrédients disparates, on rit. Les absurdités surjouées d’un Lucchini magnifié dans le rôle du père de famille affreusement bourgeois, incestueux et bossu, à la démarche coincée sont tordantes. On rit quand il marmonne la bouche molle et quand ses sourcils se lèvent ponctuant ses emphases lyriques de soubresauts effarés. On sourit d’un comique de répétition employé avec mesure. On aime les notes aiguës que Juliette Binoche va chercher très haut. On s’amuse des longs plans portraits de Ma Loute qui dénotent l'absence de sa réflexion. Et on ricane de ce duo aux mots incompréhensibles qu’illustrent les deux policiers, remake de Dupont et Dupont et de Laurel et Hardy.

© Roger Arpajou © Roger Arpajou

Pourtant, le jeu des acteurs sonne parfois faux et les clichés semblent paradoxalement trop exagérés ou pas assez creusés. La lourdeur des dialogues dévoile que le réalisateur n’est pas encore très à l’aise avec ce genre de films. Sous ses airs potaches, la trame soulève pourtant de véritables questionnements. Le gouffre culturel et social qui s'érige entre les bourgeois et les roturiers aussi horribles les uns que les autres, la recherche et l’acceptation de soi à l’adolescence, les problèmes de genre, les tourments de l’éducation, le poids de la famille… Il y a tellement d’ouvertures faites et laissées en suspens que l’on ne sait plus trop comment envisager ce film qui laisse une bizarre impression.

© Roger Arpajou © Roger Arpajou

Mais allons, globalement, on rit, c’est original, on est surpris à chaque nouvelle péripétie, et bien qu’il y ait peut-être trop de questionnements soulevés, on sort de la séance enchantés ! Ce sentiment dérangeant, bancale, totalement irrationnel laisse pourtant, de façon toute aussi incompréhensible, un plaisir délicieux.




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