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Critique : Love is Strange, un film de Ira Sachs

23 novembre 2014, par Untitled Magazine

Après 39 ans de vie commune, George et Ben décident de se marier. Mais, au retour de leur voyage de noces, George se fait subitement licencier. Du jour au lendemain, le couple n’est plus en mesure de rembourser le prêt de son appartement New-yorkais. Contraints de vendre et de déménager, ils vont devoir compter sur l’aide de leur famille et de leurs amis. Une nouvelle vie les éloignant l’un de l’autre, s’impose alors dans leur quotidien.

@ DR. Tous les droits réservés. @ DR. Tous les droits réservés.

A l’heure des mids-terms aux Etats-Unis, où le parti républicain est en train de rafler les sièges du Congrès, laissant Obama et les démocrates l’arme basse quant aux réformes sociales (mariage homosexuel etc.) qu’ils mettaient en place, le film fait polémique et la réalité dérange. En effet, il s’est vu attribuer par la MPAA (Motion Pictures Association of America) la statut « R » pour « restricted », interdisant l’accès à la projection aux mineurs de moins de 17 ans non accompagnés. Pourquoi ? pour cause de « langage vulgaire ».

Dans une Amérique puritaine donc, les juges du cinéma ont les plein pouvoirs, et pour ne pas choquer, ils handicapent un film qui ne fait rien d’autre que montrer la réalité des foyers de notre époque. Car oui ! Que l’on soit aux Etats-Unis ou par chez nous, dans les maisons ça hurle, ça dit des gros mots parfois, ça couche ensemble souvent (pas de scène de sexe explicite pourtant dans Love is Strange) et ce n’est pas toujours rose. Apparemment donc, le vrai dérange, de l’autre côté de l’Atlantique…

En sera-t-il pareil en France, en plein jours boueux de la ‘Manif pour tous’ où des familles, sous couvert de défendre l’intégrité nationale, défilent pour le patriotisme, leur patriotisme, celui qui consiste à se battre contre les droits des autres ? Non. Non car les férus de cinéma, ceux qui demandent à ce qu’on les fasse réfléchir, simplement, ou pleurer et s’émouvoir, iront voir Love is Strange, car c’est un très bon film.

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Peter Travers, critique pour le magazine Rolling Stones a dit : « Le mot ‘jouer’ n’a jamais autant pris son sens. Vous voulez savoir ce qu’est l’amour ? Regardez Lithgow (Ben) et Molina (George), et apprenez ». L’amour, l’amour et toujours l’amour, sujet intemporel et toujours inépuisable. Mixez le tout avec le génie d’Ira Sachs et le talent de ses acteurs, et vous aurez le film de cet automne.

Ben et George viennent de se marier, et doivent aussitôt se séparer, après avoir vendu leur maison, pour aller vivre chacun dans une partie de la famille. C’est là que commence la difficulté à vivre loin de la personne qu’on aime. Tout au long du film, Ben, qui semble un peu plus indépendant, survit en peignant, et en cassant gentiment les oreilles à ses hôtes. George lui, dépérit. Hébergé par un couple de jeunes policiers gays qui organise des fêtes tous les soirs, il n’a qu’une idée en tête : fuir. La réussite du film est là: le spectateur sait qu’il a affaire à deux hommes qui s’aiment depuis trente ans, mais pourtant, rien n’a changé. Et il peut, à vingt, quarante ou soixante ans, s’identifier à ces êtres émouvants ou fantasmer sur l’amour parfait des princes et des princesses, le gnangnan en moins et l’émotion en plus.

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Car Ben et George sont des personnages attachants, chaleureux, drôles, et l’interprétation de John Lithgow et Alfred Molina est époustouflante de douceur et de justesse. Les deux acteurs sont au sommet de leur art, et pour les fans de films de super héros, voir ce dernier camper un homme gay amoureux après avoir joué le méchant et tentaculeux Dr Otto Octavius dans Spider-Man 2 est juste délicieux. Cet acteur sait tout faire (il tourne dans cinq films qui sortent en 2014). Pareil pour John Lightgow, qui fait partie de ceux dont on connait les traits (La planète des singes : Origines, The Homesman et Interstellar, le dernier Christopher Nolan) mais dont on n’arrive pas à donner le nom. On retrouve aussi la lumineuse Marisa Tomei (Ce que veulent les femmes, The Wrestler…), géniale dans son rôle de maman quarantenaire en proie aux doutes face à un mari trop rigide et à un ado trop ado, ainsi qu’une ribambelle d’autres acteurs aussi doués et sympathiques les uns que les autres.

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Bref, c’est un plateau en or que nous sert Ira Sachs. Mais pas seulement. Si l’on s’attache au jeu et à toutes ces têtes, on ne peut aussi qu’apprécier le scénario et sa mise en forme.

Love is Strange est un film sur la réalité, qui évolue dans le décor cosy des appartements de Greenwich village, au milieu des écrivains, des peintres, des artistes. La religion y est traitée en coup de vent, comme un frein au progressisme (ça ne plaira pas à tout le monde) et de nombreuses autres questions sont posées en toile de fond. Comment fait-on pour élever un enfant à deux, avec des méthodes opposées, lorsque celui-ci semble être en pleine crise d’ado ? Comment supporte-on, pour les uns, d’être séparée de celui ou celle qu’on aime, d’être assisté, et pour les autres d’avoir à accueillir sous son toit un ‘étranger’ ? Il faut voir ce film magnifique pour se les poser et essayer de comprendre ce que dit Ben au début. Il est au téléphone avec George, séparé de lui depuis peu, et admet, en un élan d’honnêteté et de clairvoyance qui le caractérise : « Ils sont gentils mais parfois, quand on vit avec les gens, on apprend à les connaître plus qu’on voudrait »…

Love is Strange Un film de Ira Sachs Avec Alfred Molina, John Lithgow, Marisa Tomei… Sortie le 12 novembre 2014.




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