John (Ulrik Munther), encore adolescent, rentre chez son père après avoir été incarcéré et aspire à un nouveau départ. Mais la communauté locale n’a ni oublié, ni pardonné son crime. Sa présence attise les pires pulsions chez chacun, l’atmosphère devient menaçante, proche du lynchage. Rejeté par ses anciens amis et abandonné par ses proches, John perd espoir et sa violence refait peu à peu surface. Dans l’impossibilité d’effacer le passé, il décide d’y faire face.
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« Le lendemain » , premier long métrage du Suédois Magnus von Horn présenté à Cannes lors de la Quinzaine des Réalisateurs en 2015, est un film à part sous bien des aspects. Pas d’information sur le héros, sur ce qu’il a pu faire, où il vit, pourquoi il est rejeté… Le réalisateur nous laisse le temps d’apprivoiser cet adolescent qui semble perdu. On retrouve un certain plaisir à découvrir une histoire dont on ne sait pratiquement rien, ni où elle nous mène. Tout ce que l’on voit c’est un jeune qui ne réagit pas comme tout le monde, rejeté par la plupart pour un motif que l’on ignore. John est souvent pris de crises incontrôlables, mais seulement dans les moments où il perd pied, qu’il se sent seul, dans ces moments de faiblesse, qu’il réagit de manière violente et irréfléchie.
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Les sentiments des gens présents dans l’environnement de John sont plus complexes qu’il n’y paraît. Certains le craignent, d’autres le rejettent, une va l’admirer… Son père semble un temps le seul à être de son côté et vouloir qu’il s’en sorte. Mais lorsqu’il va devoir revenir au lycée, les évènements vont s’enchainer jusqu’à toucher le peu de repère familial qu’il avait. Le père semble de plus en plus esseulé face à tous les éléments qui s’enchainent en défaveur de sa famille. Au pied du mur, il va sauver le seul qui a encore de l’avenir, le petit frère de John dont il commence à perdre le contrôle également. L’absence du père dans la scène finale le démontre, il écarte l’ainé irrécupérable pour sauver son petit car il ne veut plus répéter les erreurs du passé. Cette solitude du père est extrêmement bien traitée dans deux scènes : subtilement lorsqu’il attend le retour de son fils devant la télé, brutalement lors de l’affrontement direct avec une bande de jeunes.
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Le film ne traite pas du lendemain du héros mais de celui de tout le monde touché de près ou de loin par cette affaire dont on ne sait rien. "Le lendemain" questionne sur les limites de l’efficience du système scolaire, les dommages collatéraux d’un drame qui semblent impossible à guérir, la réinsertion…
L’histoire se déroule et les plans s’enchaînent avec une technique assez académique mais bien maîtrisée. Mine de rien Magnus von Horn se dévoile comme un réalisateur qui maîtrise son sujet, qui affirme des choix forts (absence totale de musique, générique de fin inclus), et certaines structures de ses plans seront à étudier de près.
Remarquablement éclairé par Łukasz Zal, qui a notamment été nommé pour l’Oscar de la Meilleure photographie pour le film « Ida » en 2015. « Le lendemain » est un film qui rappelle beaucoup « Boy A » de John Crowley sorti en 2009, qui avait révélé Andrew Garfield avant « The Social Network » et « The Amazing Spider-Man ». On souhaite au moins le même parcours à Ulrik Munther et Magnus von Horn.
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